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Vendre dans l’Empire du Milieu

Vendre en Chine n’est pas plus compliqué que de vendre ailleurs. C’est différent et c’est à toi vendeur de t’adapter. Ici quelques idées pour t’aider.

Ni hao ! Ami vendeur, tu te demandes peut-être si vendre en Chine est comparable à vendre en Europe. La plupart des gens te répondront que ça n’a rien à voir en raison de la culture locale. C’était également mon avis il y a quelques années (ICI), mais j’en ai changé. En effet vendre consiste à faire en sorte que quelqu’un prenne la décision d’acheter ton produit à des conditions acceptables pour les 2 parties. L’acheteur met plus de valeur dans le produit ou service qu’il achète que le montant payé et le vendeur lui met plus de valeur dans l’argent reçu que dans le produit cédé. Que l’on vende en Chine, en Syldavie ou n’importe où ailleurs cela s’applique. 

Alors bien entendu, il y a des différences. Les valeurs, les modes de fonctionnement viennent de traditions plusieurs fois millénaires qui par leur distance ne peuvent pas correspondre aux nôtres. La Chine c’est très loin, aujourd’hui sans escale c’est 13 heures de vol depuis l’Europe. Moins de 300 ans plus tôt il fallait des mois pour atteindre l’Empire du Milieu. Pour pouvoir vendre ici, tu dois te préparer à une culture différente mais la vente reste la vente.

Le langage et l’écriture constituent une première barrière. Il est admis qu’un adulte occidental mettra au moins 10 ans avant de pouvoir se débrouiller dans toutes les situations de la vie courante à l’oral. Quant à l’écrit, c’est souvent plus long. D’un autre côté pour un chinois parler l’anglais est également un challenge. Beaucoup prétendent le faire, ils parlent en réalité le « chinglish ». Il est délicat de dire à ton interlocuteur qui fournit des efforts linguistiques qu’il est incompréhensible. Les Chinois sont assez fiers et avoir tort c’est perdre la face. L’humiliation est très mal vécue. Un vendeur qui explique à un client chinois qu’il se trompe doit macher sur des œufs et s’assurer de laisser une porte de sortie honorable à celui qui a eu tort. 

La culture d’enseignement est à prendre en compte. A tous les niveaux scolaires, y compris universitaires, une grande partie des connaissances est acquise en apprenant par cœur. Si tu as une équipe de vente locale, attends-toi à devoir faire et refaire plusieurs fois les mêmes formations. Attends-toi également à ce que l’on te pause la même question 5 fois même si les 4 précédentes tu as répondu en détails. Avant toute formation demande-toi ce qui doit être absolument retenu pour être en mesure de vendre ton produit ou service. Ce tri n’est pas le plus simple mais est vital car ce seront sur ces sujets-ci que tu devras appuyer pendant tes trainings. Un quizz de fin de sujet ou thème est utile pour t’assurer de ce qui est retenu après 1 heure, 1 jour, 1 semaine, 1 mois…

Le prix est demandé très rapidement. La technique chinoise est très simple, les clients t’invitent par un « Vous avez fait une longue route jusqu’ici, vous avez certainement des informations à nous donner. Nous vous écoutons, combien coûte votre produit? », et ensuite ils te regardent et attendent. Si tu insistes avec des questions, ton interprète te dira qu’il faut répondre au client, et que c’est comme ça ici. Inutile de te préciser que tout prix lâché à ce niveau ne sera jamais dépassé. Résiste tant que tu peux, fais-toi préciser le besoin exact, les options, les détails les plus infimes, les dates, les conditions de paiement, l’Incoterm. Pose des questions. Si tu dois malgré tout donner un prix, le meilleur conseil est de multiplier le prix réel par 10 ou 20. Il y a plusieurs avantages à cette méthode : il y a des chances qu’ils te donnent leur prix actuel, qu’ils précisent exactement leur besoin. Le risque que la discussion se termine ici est également réel. Tu peux toujours annoncer que « pour une si petite quantité, on va produire ce prototype adapté à leurs besoins en Europe, il faut compter le transport, le dédouanement…etc. » lorsque tu donnes ton prix exagéré.

Une portion non négligeable d’entreprises sont des entreprises d’état. L’état Chinois s’occupe de fabrication d’acier, de textile, d’imprimerie, de construction de machines, ainsi que d’une multitude d’autres domaines improbables. Ces entreprises sont dirigées par des membres du parti communiste Chinois. Généralement dans ces sociétés il y a une hiérarchie et une administration pléthoriques. Il n’est pas rare de se retrouver dans une réunion face à 10 personnes. Dans ce cas le «chef» – donc celui qui décide – sera à l’une des 2 extrémités de la table. En début d’entretien tu n’as que 2 décideurs potentiels, ce qui lorsque 7 ou 8 personnes se présentent te permet d’y voir assez vite clair. Le plus compliqué dans ces entreprises n’est pas l’identification du détenteur de l’argent comme on vient de le voir. Le plus dur c’est la corruption. 

Dans les entreprises d’état, tu découvres que le produit local utilisé pouvait être avantageusement remplacé par ton produit et que compte tenu de ce que tu as vu, ton prix sera facilement justifiable. Tu te frottes les mains d’avance, tu es incollable sur le sujet, tu as les bonnes présentations. La réunion débute, tu montres ce qu’ils ont et ce qu’ils pourraient avoir. Tu auras une assemblée attentive et gourmande d’informations à l’exception d’une personne. Et tu recevras de cette personne toutes les objections possibles et imaginables. Infatigablement tu auras un opposant pugnace. Sa pugnacité s’explique par les commissions qu’il reçoit à chaque livraison de la part du fournisseur actuel. Si ton produit séduit son chef, il perd son avantage d’une part et la face vis-à-vis de son partenaire qui le soudoie. Donc là tu rentres dans du délicat.

Bien entendu je ne vais pas te conseiller de te livrer à de la corruption. Mon conseil est au contraire de ne même pas y penser 1 seconde. Le doigt, l’engrenage… tu imagines la suite, dans un pays qui donnera par principe raison aux chinois. Face au fâcheux qui risque de perdre une source de revenus, il faut traiter la première objection par des questions jusqu’à que tu comprennes ce dont il s’agit. Avant de répondre, demande-lui : « y-a-t-il autre chose qui vous empêche de considérer notre offre ? ». Le but étant de désamorcer un flot infini d’objections avant de te lancer dans une discussion sans fin. Si tu trouves des réponses que tu peux chiffrer en argent auprès de celui que tu as déterminé être le chef, le corrompu pourrait se résigner assez vite. Ici comme partout, peut-être plus qu’ailleurs, parler d’agent, de gains possibles permet d’obtenir une oreille bienveillante. 

Comme tu vois, il s’agit de s’adapter. Certes avec les différences de cultures de la souplesse est nécessaire. Mais n’est-ce pas l’essence du travail de vendeur que d’être souple, agile, vigilant ? Les règles de bon sens du vendeur s’appliquent en Chine comme partout ailleurs : on ne donne son prix uniquement quand on a compris le besoin, on ne répond pas à une objection sans s’assurer que c’est le problème de fond. On pose des questions, tout le temps et on écoute les réponses.  Sois curieux et ouvert.

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Par baichette

Passionné de voyages, photos avec un téléphone et de vente.

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