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Longh comm la fabrica del Domm

« J’étais en réunion, commerciale c’était long comme la construction du Dôme de Milan! ». L’expression est facilement validée par la longueur des travaux qui ont duré de 1386 à 1932, soit la bagatelle de 546 ans

En dialecte milanais la formule est employée pour désigner quelque chose d’interminable. « J’étais en réunion, commerciale c’était long comme la construction du Dôme de Milan! ». L’expression est facilement validée par la longueur des travaux qui ont duré de 1386 à 1932, soit la bagatelle de 546 ans. Seulement 37 ans après cet aboutissement, l’édifice commence à présenter des signes de faiblesse. On évoque la pollution urbaine, la baisse de la nappe phréatique, les trépidations liées à la circulation automobile sur cette zone rendue plus fragile par le percement du métro. En urgence, dès 1969, la circulation est arrêtée autour du Dôme et les métros roulent au ralenti dans la zone du Dôme. En 1980 commencent des travaux de renforcement des piliers de la tour lanterne, celle qui est surmontée par la Madonnina dorée qui est devenue un des symboles de la ville.

Le plus vraisemblable pour expliquer cette relative fragilité est l’accumulation d’erreurs de construction. Les sources d’erreurs sont multiples tout au long de la réalisation. 20 générations de bâtisseurs se sont succédées. On peut aussi compter en papes, on parle d’une cathédrale après tout, et ça en fait 57. Le nombre de seigneurs, comtes, évêques, et divers dignitaires de l’église qui ont eu leur mot à dire est également impressionnant. Les erreurs sont apparues très tôt dans la construction et le planning a tout de suite pris 4 ans de retard. Sur le lieu d’édification de l’actuel Duomo, il y avait la basilique Santa Tecla et surtout aa cathédrale Santa Maria Maggiore. Avait-on le droit de détruire la cathédrale où fut baptisé Saint Augustin en 386? Il a fallu 4 ans pour conclure que oui, on pouvait.

En 1387 Gian Galezzao Visconti alors seigneur de Milan, prend en main les travaux et fait détruire la quasi totalité des constructions de l’année précédente. Il vient de décider d’un changement de plans pour la réalisation de la « cattedrale della Natività della Beata Vergine Maria ». D’après les premiers plans, le nouvel édifice devait être construit à l’origine en briques selon la tradition et les techniques de l’art gothique lombard. Gian Galezzao Visconti voyait grand : ce sera du marbre de Candoglia. Quitte à se lâcher sur le marbre, il agrandi la surface en rajoutant 2 nefs de part et d’autre de la nef initiale. Ce premier changement d’architecture majeur inaugure une série qui ne s’est arrêtée qu’à la fin du XIX° siècle.

Immédiatement après ce changement majeur l’architecte en chef Simone d’Orsenigo se rend bien compte que le marbre change tout et qu’il faut tout recalculer. Pour ceci, il s’adresse en septembre 1987, au mathématicien local Gabriele Stronaloco. Ce dernier doit, en fonction du nouveau plan, préciser la hauteur de la cathédrale et le nombre de colonnes nécessaires ainsi que la profondeur des fondations pour chaque pilier. Les calculs sont longs et compliqués : les poids et mesures n’étaient pas standardisés en ce temps-là. En février 1388 le mathématicien annonce qu’il faudra 20 colonnes de 66 brasses de haut et 10 de fondations. Comme le marbre venait du Piemont, notre mathématicien a fait tous ses calculs en brasses piémontaises (=1674mm) sur la base de plans réalisés en brasses lombardes (=1872mm). Une différence de 198mm répétée plusieurs dizaines de fois quand on construit une voute a forcément une influence. Il a fallu plusieurs effondrements pour que cette erreur d’unité soit détectée. 

Recherchant la perfection pour son projet, le seigneur Visconti a fait venir des architectes de toute l’Europe. Les plus fameux viennent d’Espagne, France et Allemagne. Malheureusement l’hostilité des maîtres lombards s’est assez rapidement fait ressentir. Seul le français Nicolas de Bonaventure a pu finir les 3 fenêtres centrales du choeur avant de partir. Vignot, Coene et Gmünd ont tous 3 laissé des commentaires amers dans leurs archives au sujets de leurs séjour sur le plus gros chantier de l’époque. Les difficultés de communication entre ouvriers ont abouti à de nombreux accidents mortels. Les archivistes de l’année 1512 rapportent 122 accidents mortels et plus de 400 blessures enregistrées sur le chantier.

Bouffi d’orgueil, l’ingénieur en chef Filippino degli Organi, quand il apprend que le pape Martin V fait le voyage de Rome en 1418 pour constater l’avancée des travaux, décide d’accélérer la construction du maître-hôtel. Il veut être le premier ingénieur à voir son travail béni par un pape. En une semaine, le travail qui était planifié sur 3 mois a été achevé. Martin V a consacré le maître-hôtel et, peut-être grâce à ceci, ce dernier n’a jamais connu de problèmes de conception contrairement à beaucoup d’autres. En 1572, l’archevêque de Milan, Charles de Borromée, impose un rythme accéléré pour consacrer lui-même l’église dont il supervise la construction. Il en résultera plusieurs malfaçons qu’il faudra réparer plus tard. Bien qu’elle ne soit pas terminée, l’archevêque consacre l’église le jour de Noël. Quelques effondrements ultérieurs sont à imputer à cette période.

Avec 3’400 statues dont 2’300 à l’extérieur, le Dôme de Milan se distingue de bien dés édifices religieux. On a sculpté pendant la totalité de la construction. La plupart des sculptures extérieures sont posées en ornements des arcs décoratifs extérieurs. Ces derniers n’ayant pas de fonction structurelle, on les a équipés avec les statues sans savoir exactement si ça allait tenir.

Grand édifice de 93m de large par 158m de long pour une hauteur maximale de 108.5m, le Dôme de Milan a bénéficier de la sagesse des générations d’architectes qui se sont succédés. Il reste plus petit que St. Pierre de Rome. Il avait toutes les raisons de s’effondrer. Fort heureusement il n’en est rien. Certains y verront une intervention divine… Qui qu’il en soit, c’est à visiter quand on va à Milan. J’espère n’avoir pas été trop long.

Par baichette

Passionné de voyages, photos avec un téléphone et de vente.

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