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Mur de Berlin « Je suis une pâtisserie »

le camarade Khrouchtchev avait résumé la situation par ces termes virils dans son langage habituellement cru hérité de son enfance campagnarde : « Berlin c’est la paire de couilles de l’Occident. A chaque fois que je veux les faire crier, je n’ai qu’à presser »

Goguenard, quelques temps avant cette nuit du samedi 12 au dimanche 13 août 1961, le camarade Khrouchtchev avait résumé la situation par ces termes virils dans son langage habituellement cru hérité de son enfance campagnarde : « Berlin c’est la paire de couilles de l’Occident. A chaque fois que je veux les faire crier, je n’ai qu’à presser ». Semblant prendre le monde par surprise, l’armée de la Deutsche Demokratische Republik (RDA) a mobilisé 14’500 soldats et autant de membres des «groupes de combat de la classe ouvrière». En une nuit, le secteur ouest de la ville est encerclé de barbelés. Première étape de ce qui deviendra « le Mur de Protection Antifasciste » ou, si l’on considère le point de vue occidental « Mur de Berlin » ou encore « Mur de la Honte ». Le dispositif une fois complet représentait 2 murs de 3.6m de haut entre lesquels se relayaient 11’000 gardes assistés de 1’000 chiens dans un chemin de ronde de plus de 155 Km. À intervalles réguliers, 302 miradors et derrière les murs un no-man’s-land plus ou moins large en fonction des endroits, décoré de herses et de fils de fer barbelés. Seuls 7 points de passage entre l’Est et l’Ouest subsisteront à la fin 1961.

Alors que l’occident est en pleine vacances (Kennedy pèche au large de Cap Cod, Mac Millan pèche aussi mais en Ecosse et le Général de Gaulle se repose à Colombey-les-deux-Eglises), la presse titre sur la surprise causée par l’opération Est-Allemande. Il parait cependant improbable que les services secrets des puissances occupantes n’aient rien su avant. Walter Ulbrich, président du conseil d’état de la RDA, lors d’une conférence de presse le 15 juin 1961 (soit 2 mois avant l’érection du mur) conclut une réponse à propos de la sécurité de Berlin par un « Personne n’a l’intention de construire un mur ! » Qui n’avait pas grand chose à voir avec la demande de départ. Les réactions occidentales à l’agression ont pris 2 jours. Le 15 août les chars Américains, Anglais et Français font aux chars Est-Allemands. La tension est à son comble.

Bien qu’officiellement la protection contre le fascisme justifiait la création du mur, la vraie raison était économique. Entre 1949 et 1961 on estime à 3 millions le nombre de personne ayant quitté la RDA pour la RFA en profitant de la relative liberté de circulation à Berlin. Soit en gros 15% des 19 millions d’allemands de l’Est. De plus, Berlin constituait une porte de sortie vers l’occident pour les habitants des pays du bloc de l’Est voisins. Les personnes qui votaient avec leurs pieds selon l’expression de l’époque étaient souvent jeunes et éduquées. Il fallait faire cesser cette hémorragie de talents et de main d’oeuvre. Il y avait plus de 50’000 personnes qui passaient à l’ouest tous les jours pour travailler en employant le métro ou le train qui circulaient entre les secteurs de la ville. Le Mark de l’Ouest valait plus que celui de l’Est. Chaque jour des milliers de personnes choisissaient le camp de la liberté et ne rentraient pas à l’Est. 

Rien que le très inquiétant Ministère de la sécurité d’état (Ministerium für Staatssicherheit), plus connu sous son abréviation Stasi justifie le désir de fuite des Allemands de l’Est vers des cieux plus réjouissants. La Stasi c’était plus de 91’000 agents et 175’000 informateurs. Tout le monde espionnait tout le monde. La liberté d’expression n’existait aucun cas et il valait mieux taire ses opinions lorsqu’on ne connaissait pas extrêmement  bien les gens à qui on parlait. Même cette précaution ne suffisait pas les exemples de trahisons au sein de familles ou de couples sont légion. A ce sujet le film « La vie des autres » (Das Leben der Anderen) est à voir absolument pour espérer se rendre compte de l’atmosphère de l’époque. 

Il n’a pas fallu longtemps aux Berlinois pour comprendre que, tant qu’elle était de barbelés, la frontière était encore franchissable. Bien que le nombre de départ ait baissé drastiquement, dans les premiers jours beaucoup ont tenté leur chance. Le garde Conrad Schurmanns et son évasion en sautant au dessus des barrières qu’il était supposé surveiller a été filmée en 1962. On peut suivre son destin un peu triste ici. Dans les premiers jours d’autres évasions rocambolesques sont reportées. Mais rapidement le bouclage se renforce. Un certain courage était nécessaire pour tenter la fuite. Les chiffres varient entre 400 et 1’200 personnes qui auraient été tuées par les gardes qui avaient l’ordre de tirer, y compris sur des femmes et enfants. La plupart des fuyards ont utilisé des faux papiers. Cependant le nombre de passages s’est très rapidement limité.

En 28 ans d’existence le mur de la honte a été franchi à de multiples reprises. On peu citer pèle-mêle l’utilisation d’un avion bricolé autour d’un moteur de Trabant  601, des sous-marins miniatures, des tyroliennes lancées d’un bâtiment officiel, un filin pour un funambule, de caches à double-fond pratiquées des coffres ou tableaux de bord de voitures, des haut-parleurs et même une statue de vache. Les évasions les plus spectaculaires ont eu lieu en tunnel. Des gens ont travaillé dans le plus grand secret des mois durant pour produire des canalisations de 80/90cm de haut x 60cm de large sur des distances supérieures à 150m. Les tunnels ou du moins leurs embouchures existent toujours et sont nommées Tunnel 29, Tunnel 97… en fonction du nombre de personnes qui  les ont empruntés.

La réussite de ces évasions épiques ne doit pas éclipser les échecs de nombreux candidats à la liberté. Peter Fechter alors âgé de 18 ans le 17 août 1962, est une des premières victimes lorsqu’il tente sa chance avec son ami Helmut Kulbeik. Leur plan consistait à se cacher dans un atelier de charpenterie et de sauter dans la « bande de la mort » depuis une fenêtre de ce bâtiment, puis d’escalader le mur qui encore en construction ne mesurait pas encore les 3.6m standard. Helmut a franchi le mur alors que Peter a été touché au bassin alors qu’il l’escaladait. Il est retombé du côté Est et il fut laissé agonisant plus d’une heure. Les occidentaux entendaient son martyre. Les gardiens ne sont venus le chercher qu’après sa mort.

Et comment terminer sans parler du 23 juin 1963 et du discours de J. F. Kennedy devant une porte de Brandenburg masquée par d’épais rideaux noirs. Les Américains et les Russes jouaient à Je-te-tiens-par-la-Barbichette depuis la fin de la guerre et Kennedy presque 2 ans après l’érection du mur faisait d’une pierre plusieurs coups: il brillait internationalement par un discours de fermeté empreint d’ouverture. Il effaçait les échecs récents (Baie des Cochons, U2….). Cette mise en lumière valorisait son action auprès des électeurs américains. La campagne pour un 2ème mandat s’ouvrait. Et par dessus tout des hauts-parleurs diffusaient son discours tout au long du mur en direction de l’Est. Une controverse grammaticale cependant. Le fameux « Ici bin ein Berliner » qui a été prononcé dans le sens « Je suis un Berlinois » se traduit littéralement « Je suis un Berliner » (Le Berliner est une pâtisserie locale voir ici). Amusant non?

Sources Images : Philippe en Voyage d’Affaires + Wikipedia
Source Video : GK

Par baichette

Passionné de voyages, photos avec un téléphone et de vente.

2 réponses sur « Mur de Berlin « Je suis une pâtisserie » »

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