Une des principales ressources des entreprises est leur réputation. La réputation est ce qui fait que nos clients se chargent spontanément de vanter vos qualités auprès de leurs confrères et se mettent à faire notre métier de vendeur. Nos clients deviennent des prescripteurs que l’on peut qualifier d’engagés auprès de la profession. Avouons que cette manière de se faire reconnaitre est sous-exploitée voire inexploitée par les entreprises. Or ce canal publicitaire présente plusieurs avantages dont son côté économique. Investir sur sa réputation n’est jamais un mauvais investissement sous réserve de rester raisonnable vis-à-vis de ses capacités réelles et ne pas se retrouver tel la grenouille dans la fable.
Mercedes dans les années 1993-1994 a vu l’arrivée de Lexus, la marque de luxe du groupe Toyota, avec certaines craintes. Les voitures étaient au niveau et étaient diffusées sur le marché avec des prix de 10 à 15% inférieurs à ceux des modèles Mercedes équivalents. A la sortie d’une réunion organisée par ma société dans un hôtel proche de Stuttgart, j’ai discuté de ce point avec une personne de Mercedes qui elle-même avait eu une réunion dans cet hôtel. La décision qui avait été prise ce jour-là était surprenante : Mercedes allait augmenter ses prix de 10%. Ainsi la différence avec Lexus serait de 20% au minimum. Le pari qui a été fait est qu’avec une telle différence, compte-tenu de la réputation de Mercedes, les clients se diraient « Si peu chère, une Lexus ne peut pas être au niveau de qualité d’une Mercedes ». Il semble que cette exemple, un peu ancien certes, illustre parfaitement le positionnement par la réputation. Aujourd’hui encore, Lexus ne fait pas beaucoup d’ombre à Mercedes alors que les véhicules sont très comparables techniquement.
Le moment parfait est lorsque le client conteste un point de qualité dans la livraison. La prise en compte du problème, la communication pendant la résolution et le temps et la façon de résoudre le problème sont des leviers à actionner si on veut se forger une réputation d’efficience. J’emploie à desseins « Efficience » et non « Efficacité ». L’efficacité c’est la capacité d’obtenir le résultat souhaité ou attendu, d’atteindre l’objectif fixé… L’efficience c’est la capacité de parvenir à un maximum de résultats avec un minimum de ressources. Loin d’être incompatibles l’un envers l’autre, ces 2 mots présentent une nuance notable. L’un consiste à y arriver, l’autre à y arriver le mieux possible pour tout le monde. Efficience donc.
La prise en compte du problème :
Savoir ce qui s’est passé ou mal passé avec notre produit est déjà un challenge et cette part, déjà compliquée, est insuffisante Il s’agit surtout de faire parler le client sur ses propres enjeux. A quel niveau de criticité est-on chez le client ? Si nous ne parvenons pas à vous livrer ces pièces à cette date, que se passera-t-il ?
La communication pendant la résolution du problème :
En interne c’est une partie délicate. On est inondés de mails et ce genre de communication génère du trafic supplémentaire. Plus particulièrement lorsqu’il faut coordonner production, expédition, documents de transports et douanes…. et autres joyeusetés administratives d’une usine à l’autre.
Vers le client, il doit être informé de l’état de la réparation en cours ou du remplacement de ses produits. Dans ces cas-là, quand c’est possible, je donne en plus des détails sur les étapes et actions suivantes. Je suis le dossier avec mon client sur des base communes.
Le temps et la façon de résoudre le problème :
Un point critique mais quand on a bien creusé la partie enjeux il y a tout le temps des boutons à pousser pour que chacune des parties prenne ses responsabilités. Il y a un problème à résoudre lié à notre livraison ou produit. Notre rôle consiste à le résoudre, pas à résoudre d’autres problèmes chez le client. A la fin on trouvera toujours un arrangement qui permettra à chacun de sauver la face et les meubles, surtout si on parle d’arrêts de production.
Le dernier point est celui de l’analyse objective à l’issue de la réclamation. Qu’avons-nous fait bien ? Qu’aurions-nous dû faire différemment ou mieux ? Comment valoriser ces actions dans notre relation client ? Sont quelques-unes des questions auxquelles il faut apporter une réponse en vue de détecter les maillons faibles de notre organisation pour les renforcer. L’ensemble doit être documenté et indexé pour une recherche au minimum par « dysfonctionnement » et « origine du problème », mais d’autres paramètres sont à envisager en fonction des spécificités de chaque entreprise.
L’efficience est dans la plupart des cas une affaire de conscience collective. Au sein d’une organisation telle qu’une entreprise la qualité perçue par la production est souvent différente de celle envisagée par le commercial et encore différente de celle attendue par client. Encore une fois la responsabilité commerciale est grande : analyse du besoin précis et contexte d’achat sont à maîtriser avant de se mettre en risque qualité.
La réputation sur un marché se cultive et la gestion des réclamations est un excellent terreau pour ceci. Bien traiter ses réclamations revient toujours à améliorer ses productions et c’est un pas de plus vers l’efficience. Comme disait M. Gucci « On se souvient de la qualité bien plus longtemps que du prix ».
Pour compléter la phrase d’Auguste Detoeuf « Ne vous plaignez jamais d’un client difficile car il est la cause de vos progrès. Traitez les autres mieux encore, ils sont les raisons de vos bénéfices », Peut-on imaginer Rolls Royce laisser un client en panne au bord de la route ? Peut-on imaginer Louis Vuitton incapable de tracer de A à Z le moindre de ses sacs féminins bien connus ? Et tant d’autres exemples avec pour point commun entre toutes ces marques phares : un niveau de prix rarement discuté.
La réputation passe par la qualité à tous les stades de l’action de l’entreprise. Elle est aussi une affaire de communication : on a un savoir-faire qu’il convient de faire savoir.
A bientôt.